Le théâtre du Pont Tournant et son directeur Stéphane Alvarez nous ont encore offert une pépite les 9 et 10 mars. Une pièce écrite par Pierre Notte pour Catherine Hiegel (à sa demande) et sa « vieille » amie Tania Torrens, elle souhaitait jouer ce rôle avant qu’il ne soit trop tard, elle voulait parler de vieillesse sans fard, sans crème anti-ride, sans artifices, sans botox, et se livrer telle qu’elle était, fripée, avec des tâches sur les mains, des plis, des replis, avec le front, les yeux et les joues qui tombent. La pièce parle de tout ça mais pas seulement. Elles se retrouvent, deux septuagénaires, dans un no man’s land où tout a disparu, le moindre insecte, la moindre nourriture naturelle biologique, le moindre plaisir. Tout est aseptisé, contrôlé, surveillé par la brigade sanitaire qui envoie ses drones pour vérifier que les quelques êtres humains survivants se fondent bien dans le moule. Elles attendent des clients, un fils, qui ne viennent pas, exposées dans un « musée humain » pour montrer à quoi ressemble une vraie vieille. Chacune défend ce qui lui reste, c’est-à-dire une chaise sur un mètre carré, et ne voulant pour rien au monde partager. Elles se livrent à des joutes verbales décapantes, piquantes, drôles voire nostalgiques se remémorant l’odeur, le goût de la baguette tradition, de la confiture, des guêpes autour du pot, des crêpes, de la cigarette, des piqûres d’abeille, elles en viennent à avoir la « nostalgie des blattes » qui a donné son nom à la pièce. Après avoir essayé de se détester, elles finissent par s’unir pour se lever et quitter ce monde où il ne se passe plus rien. Ce dialogue entre deux très grandes comédiennes est un véritable petit bijou.
Le croustillant texte de la pièce a fait l’objet d’un livre : « La Nostalgie des blattes » de Pierre Notte, éditions L’avant-scène théâtre collection quatre vents.
Marjorie MICHEL
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